La revanche de Giuly

Privé de Mondial, Ludovic Giuly a remporté la Ligue des Champions avec Barcelone. Au terme d'un match fort accompli, le Catalan a touché le ciel. Et trouvé l'occasion de livrer le fond de sa pensée sur les Bleus. Même s'il tente de relativiser, le Français du Barça est touché au plus profond.

Le destin est bien souvent étrange et prend parfois de drôles de raccourcis. Mercredi soir, Ludovic Giuly a remporté le trophée le plus prestigieux de sa carrière et atteint le firmament. Deux ans après son échec de Gelsenkirchen avec l'AS Monaco contre le FC Porto (0-3), le milieu de terrain a pris sa revanche face à Arsenal (2-1). Le tout au Stade de France. Dans l'antre des Bleus. Ces mêmes Bleus qui se sont refusés à lui par un triste dimanche de printemps. Ejecté de la liste des 23 mondialistes malgré des états de services probants avec le FC Barcelone, le vingtième tricolore vainqueur de la Ligue des Champions a ruminé durant les trois jours qui ont précédé la rencontre.

Silencieux et concentré sur sa finale de Coupe du monde à lui, l'ancien Lyonnais n'a cependant pas desserré les dents. Pas une fois, Ludovic Giuly n'a livré le fond de sa pensée sur sa non-sélection. Sur le fait que Raymond Domenech ait préféré emmener Franck Ribéry en Allemagne et décidé de le laisser sur le bord du chemin. La "mobylette catalane" est toujours restée silencieuse. C'est mercredi sur la pelouse dionysienne que Ludovic Giuly a répondu. Auteur d'une partie de qualité et injustement privé de l'ouverture du score, le numéro 8 du Barça a fait la pluie et le beau temps sur le côté droit. Altruiste, puissant dans la percussion, Giuly a déployé toute sa palette et son talent de footballeur. Et Barcelone lui doit en partie son deuxième titre en C1.

Heureux comme un môme au coup de sifflet final, Ludovic Giuly a retrouvé la parole. "Ce qui s'est passé ce soir, c'est un moment énorme. C'est une super fête. Maintenant, j'en ai gagné une ! On a eu peur pendant le match, c'est sûr, mais on n'a jamais paniqué. On a continué à jouer notre jeu pour essayer de marquer. Et, à l'arrivée, c'est le bonheur. J'ai eu des occasions, je n'ai pas marqué. Mais, peu importe, ce qu'on retient, c'est la victoire. Dès que Samuel Eto'o a égalisé, on savait que c'était gagné. " Evidemment, après cette analyse concise du succès catalan, le sujet a rapidement dévié vers la liste des 23 et la Coupe du monde 2006. Un Mondial qu'il suivra de son canapé. Comme l'Euro 2004 que l'ancien Monégasque avait loupé sur blessure.

Détendu et radieux, le visage de Ludovic Giuly s'est quelque peu assombri lorsque l'équipe de France s'est substituée à la finale de la Ligue des Champions. "Que voulez-vous que je vous dise ? Face à Arsenal, je me suis concentré sur le match. Point." Les Bleus, le Barcelonais ne souhaite plus y penser même si " cela n'empêche pas que je serai supporter de l'équipe de France en Allemagne." Du haut de ses 164 centimètres, il assure ne pas avoir "pris de revanche. Dans la vie, il y a des choses plus graves qu'une non-sélection. J'arrive à 30 ans et je fais ma vie sans Mondial."

Pourtant, la cicatrice reste bien ouverte. Et même si Ludovic Giuly n'a jamais réalisé de grandes choses sous le maillot bleu, le natif de Lyon (17 sélections, 3 buts) ne peut s'empêcher d'en vouloir au sélectionneur de l'équipe de France, Raymond Domenech. Tout en espérant que sa prestation lors de la finale lui fasse regretter ne pas l'avoir retenu dans son escouade : "Je crois qu'il a dû regarder le match ce soir. Donc... Il y a un sélectionneur qui choisit ses 23 et je ne suis pas dedans. Ceux qui connaissent le football connaissent mes qualités. Je n'ai plus à les démontrer. Il y a juste un mec qui ne m'aime pas. Tant pis pour lui."